Transformer ses cheveux en une oeuvre d’art, Melissa Nerovique
- Rédaction My Sunny Self
- 26 avr. 2023
- 5 min de lecture
Dernière mise à jour : 7 mai 2023

Découvrez l'histoire de Melissa Nerovique, une coiffeuse Afro passionnée qui a quitté sa carrière d'ingénieure chimiste pour réaliser son rêve de devenir coiffeuse à plein temps. Elle est aujourd'hui une artiste talentueuse de la coiffure Afro, travaillant sur des shootings, des campagnes publicitaires et des défilés de la Fashion week. Elle a également créé sa propre marque de bijoux pour tresses et locks, La Melysse.
Peux-tu te présenter et parler de ton parcours ? Je m’appelle Melissa Nerovique, j’ai 32 ans. Je suis originaire de la Martinique. Je suis coiffeuse Afro à temps plein depuis quatre ans, cependant, je coiffe depuis 15 ans. Avant, j’étais ingénieure chimiste mais j’ai décidé de changer de vie afin que ma passion y prenne plus de place. En effet, lorsque j’ai commencé mes études de chimie, je m’imaginais comme dans les films c'est-à-dire au laboratoire toute la journée à faire des expériences. Cependant, lorsque j’ai commencé à travailler, la réalité était toute autre car je participais à des réunions et réalisais des comptes-rendus la majorité du temps. Je me suis alors désintéressée de ce métier. J’étais dans le secteur de la chimie des matériaux, un milieu très masculin dans lequel il était difficile de me faire une place. Je n’avais jamais arrêté la coiffure, même pendant cette période. J’ai donc choisi d’arrêter la chimie et de me lancer. Je ne savais pas du tout comment j’allais m’organiser ni si j’allais réussir à remplir mon agenda… mais voilà, j’étais passionnée. J’ai donc continué à coiffer à domicile mes clientes habituelles, puis grâce au bouche à oreille j’en ai eu de nouvelles. Aujourd’hui, je coiffe également pour des photoshoots, des clips, des campagnes publicitaires ou des défilés pour de grandes marques.
Comment es-tu passée de coiffeuse à domicile à coiffeuse à la Fashion week ? J’aime beaucoup le côté artistique dans la coiffure Afro. Un jour, j’ai eu l’envie d’organiser un photoshoot, afin d’avoir de jolies images pour présenter mon travail. Je ne m’y attendais pas mais celui-ci a eu beaucoup de succès et j’ai été énormément repartagée sur les réseaux sociaux. Un jour, une agence en Italie spécialisée en coiffure Afro m’a contactée afin de me booker sur un show Dior de fashion week qui se faisait en digital car c’était pendant le COVID. Je n’y croyais pas et j’ai pensé que c’était une blague! J’y suis allée, j’étais un peu perdue mais, tout s’est bien passé ! Il y avait un coiffeur qui donnait des directives et nous, nous coiffions. Durant ce show, j’ai rencontré des personnes plus expérimentées qui m’ont alors expliqué comment ça se passait dans le milieu. C’est à cet instant que j’ai connu l'existence d’agence de coiffeur, maquilleur… Suite à cela, j’ai contacté ces agences qui m’ont répondu. J’ai donc commencé à assister différents coiffeurs. J’étais surprise face à l’intérêt que les gens portaient aux tresses! (rires). C’était nouveau pour moi car aux Antilles tout le monde fait des tresses, ça fait partie de notre culture ! J’ai beaucoup gagné en confiance et vraiment pris conscience que c’était de l’art. Puis, une fois de plus mon talent à fait ses preuves et le bouche à oreille a de nouveau opéré.
“J’ai envie qu’elles se disent que leur coiffure est différente avec le bijou et qu’elles se sentent originales.”
Peux-tu nous parler de La Melysse, la marque que tu as créée? J’ai créé une marque de bijoux pour tresses et locks il y a maintenant deux ans. Je souhaitais répondre à une demande notamment de mes clientes qui souhaitaient porter de nouveaux bijoux dans leurs cheveux. Elles trouvaient que ceux vendus dans le commerce étaient tous identiques et s'abîmaient très vite. Je voulais donc offrir quelque chose de différent, diversifié et plus qualitatif. De plus, j’aime beaucoup le travail manuel, cela me change les idées. J’ai alors fait des recherches de techniques, de matériaux afin de les créer. Entre le jour où j’ai commandé mon premier fil et le lancement de ma marque, un an s’est écoulé. Je trouve mon inspiration dans les différentes ethnies africaines. En effet, je regarde beaucoup d’images d’archives afin de connaître les matériaux qu’ils utilisaient ou encore les formes. Pour les couleurs, je m’inspire de la caraïbe, mais également des coraux. En coiffant mes clientes, j’ai remarqué qu’elles avaient toutes des personnalités et des goûts bien différents, je cherche donc à créer des bijoux pour que chaque femme s’y retrouve : colorés, simples, originaux,… J’ai envie qu’elles se disent que leur coiffure est différente avec le bijou et qu’elles se sentent originales.
Les bijoux sont “fait-main”, où as-tu appris ce savoir-faire ? Peux-tu nous en dire plus sur le procédé de création et fabrication ? Il n’y a pas d’école, j’ai donc appris et j’apprends encore sur le tas, j’essaye plein de choses ! Concernant le procédé de fabrication, d’abord je commande le matériel (les cauris, les perles, le fil,…) sans idées de créations particulières. Faire du référencement et choisir les matériaux pour les tester prend énormément de temps! Est-ce solide Durable ? J’ai toujours cette même idée en tête : “Le bijou doit être qualitatif, durable et réutilisable”. Ayant une forte clientèle aux Antilles, il me tient également à cœur que les bijoux soient résistants à l’eau douce mais aussi de mer et de piscine. Ils sont donc fabriqués en fil de laiton avec un traitement anti-ternissement dans le temps. Une fois les matériaux arrivés à mon atelier, l’inspiration me vient. Bien sûr, je regarde également les tendances de mode, j’essaye de voir ce qui plaira à ma clientèle et je commence à créer moi-même les bijoux.
Tu mets un point d’honneur à faire des petites collections, pourquoi ? Fais-tu également du sur-mesure ? Je fais des stocks limités car l’objectif de La Melysse est que tout le monde n’ait pas les mêmes bijoux. Les clientes cherchent avant-tout l’exclusivité et ne veulent pas avoir la même chose que leur voisine. Si un bijou fonctionne super bien, je le décline. Il n’y a jamais plus de 50 bijoux identiques, cela leur donne un côté exclusif et ajoute de l’engouement à chaque sortie de nouvelle collection. Je ne fais pas de sur-mesure pour ma clientèle, mais il peut m’arriver de créer des bijoux pour des shootings en fonction du moodboard.
Quel avenir imagines-tu pour La Melysse ? J’ai commencé avec les bijoux mais je ne veux pas m’arrêter là. D’abord, je veux les faire évoluer et pour cela j’aimerais travailler avec des joailliers afin de créer et développer de nouvelles techniques. Cela me permettra de pouvoir exploiter de nouvelles formes de bijoux pour des tresses collées par exemple, ce que je ne peux pas faire pour le moment avec ma technique actuelle. Ensuite, je voudrais que La Melysse devienne la référence des accessoires et produits pour l’entretien des cheveux tressés.
Que dirais-tu à quelqu'un qui hésiterait à vivre de sa passion ?
Tout ce qui se passe dans la vie n’est pas un hasard. Si je prends mon exemple, le fait d’être passée par la chimie, d’avoir eu mon parcours, six ans d’études, travailler pendant deux ans et demi… m’a beaucoup apporté et j’ai énormément appris durant cette période. Le temps ne se rattrape pas, c’est certain. Cependant, ce n’est pas du temps perdu. Il y a tellement de belles choses à venir, il faut se dire que l’on apprend. Il est vrai qu’il est risqué de passer d’une situation stable avec un CDI à l’auto-entreprise. C’est pour cela qu’il ne faut pas tout abandonner d’un coup mais y aller petit à petit. Quand il est beaucoup trop compliqué de gérer les deux à la fois, on a pas le choix, il faut en abandonner un pour être concentré à fond. Le talent et la détermination sont les deux éléments qui vont à l’encontre de l’échec.